Sud-Kivu : Ngomo ou la route de l’impossible, le calvaire d’un passager
Bukavu-Kamanyola, long de 55 Km est l’une de tronçons de la route nationale numéro 5. Cette route est dans un état de dégradation très avancée au niveau de Ngomo. Si les travaux de réhabilitation et d’asphaltage ont commencé sur la partie Nyantende-Toyota, la partie Ngomo, la plus difficile n’a reçu « aucun coup de pioche ». Ce qui rend impraticable cette partie en cette période de saison sèche. Des chauffeurs et voyageurs qui exploitent cette route s’indignent et veulent que les travaux commencent déjà, car la saison de pluie s’annonce difficile.
De l’entrée des escarpements de Ngomo ( Nyangezi à Kamanyola), c’est le calvaire. Des passagers y passent des heures, des jours ou des mois. Il suffit qu’un véhicule tombe en panne à un endroit sans possibilité de dépassement pour que tous les autres soient bloqués de part et d’autres.
Si tu avances, on passe la nuit ici
Il est 12h 46, en direction vers Kamanyola. Dans une jeep 4X4, ceinture serrée, vitres et portes bien fermées, nous avons pris la direction vers Ngomo. Sur cette route, il faut être patient. Arrivé au niveau du coin nommé « Etage », c’est une centaine de véhicules qui attend. Pas moyen de faire demi-tour ni avancer. Pour cause, un camion Actros a connu une panne.
« Stop n’avancez plus. Nous devons d’abord dépanner ce camion », lance un jeune homme torse nu, barbe et cheveux jaunes suite à la poussière.
Face à cette demande, il faut trouver où garer le véhicule pour permettre à ceux qui vont monter vers Bukavu de se frayer un chemin.
« Sur cette route, il faut être un vrai chauffeur pour savoir comment se positionner. Si non, tu peux faire le tonneau », nous fait savoir un jeune chauffeur de bus.
Après plus de 3 heures d’attente, finalement le camion a été dépanné. Nous devons encore attendre que tous les véhicules venus de Kamanyola ou d’ailleurs montent.
Si une panne d’un véhicule peut vous bloquer jusqu’à perdre du temps, l’état de la route peut tuer et ou endommager le véhicule.
Sur cette route, des couches de poussière dépassent le 30 cm à certains endroits, à d’autres ce sont des grosses pièces sorties des hauteurs de la montagne qui obstruent la route. Il faut avoir des véhicules avec des gros pneus pour descendre dans des tranchées créés par des pluies diluviennes des saisons passées.
« Si en cette période de saison sèche, cette route est ainsi impraticable qu’elle sera la situation en saison pluvieuse », s’interroge un passager rencontré à Ngomo à l’endroit dit chez « Musimbi ».
Durant la période pluvieuse, il y a éboulement des terres, l’érosion sur la route ce qui ralenti ou stoppe même le trafic routier jusqu’à ce que la route soit entretenue.
« La machine doit provenir de Nyangezi pour aménager la route et par là nous pouvons attendre même jusqu’à une semaine. S’il pleut il y aura des sérieux problèmes sur la route », renseigne un chauffeur.
Trois mois bloqués dans Ngomo
La situation n’est pas bonne à l’endroit dit « Etage », un gros camion 1929 est immobile. Pour cause, il a connu une panne pendant qu’il se dirigait vers Fizi. Pour protéger la marchandise et les pièces, deux vieux messieurs ont été recrutés pour veiller sur cet engin en plein Ngomo. Ils vivent difficilement car le propriétaire après avoir décharger sa marchandise et l’embarquer dans un autre camion, il les a abandonné.
« Nous rentrons chez nous aujourd’hui. C’est inhumain », se plaint le plus vieux cigarette à la bouche.
Et l’autre d’ajouter :
« C’est depuis 2 mois que nous sommes ici. Tu vois ce véhicule ? Il est tombé en panne il y a deux mois. Le boss nous a dépêché pour venir le proteger. Ici on a rien à manger. Le type nous a oublié. On rentre à Bukavu, il va nous sentir ».
Ngomo devrait être la priorité
Visiblement la route Nyangezi-Kamanyola ne sera pas asphalté ni juste terrassée. Sur cette route c’est de la catastrophe. Mme @SuminwaJudith ce tronçon est le plus important du Sud Kivu. @MinITP_RDC @GouvSudkivu pic.twitter.com/kUktUgl82h
— Justin, le réfugié dans son pays (RDC) (@JustinNkumbarhi) August 11, 2024
Selon plusieurs passagers et usagers de cette route, il est urgent que les travaux y soient faits car passer des jours et des nuits sur cette route c’est un manque à gagner pour eux.
« On a commencé par Nyantende, c’est bien. Mais la partie urgente serait Ngomo. On a pas vraiment espoir qu’ils vont arriver à Ngomo », regrette Alain Amisi chaffeur de Bus.
Les travaux de construction de la route nationale numéro 5 (RN5), dans son tronçon reliant les villes de Bukavu et de Kamanyola dans la province du Sud-Kivu, en RDC, ont été lancés officiellement le samedi 22 juillet à Nyangezi dans le cadre du Programme Sino-congolais, par le ministre d’Etat en charge des Infrastructures et travaux publics, Alexis Gisaro Muvuni. Alexis Gisaro Muvuni avait rassuré toute la population que toute la route sera réhabilitée.
« Nous sommes venus pour lancer ce projet de la route nationale numéro5 », avait-il promis. Plus d’une année après la canalisation n’a même atteinte Nyengezi.
A qui profite le fait de passer au rwanda ?
Pour éviter ce calvaire de Ngomo, bien des congolais préfèrent passer par le Rwanda pour rallier Kamanyola est continuer sur Uvira, Fizi et Bujumbura. Pour quitter la ville de Bukavu, vous devez payer 15 dollars. Une fois au Rwanda vous payez aussi la valeur de 15 dollars en Francs rwandais. Ce droit d’entrée a une validité de 14 jours.
« On remarque que même l’Etat congolais gagne sur l’état piteux de Ngomo. Imagine le nombre de véhicules qui traversent, c’est beaucoup d’argents que la DGDA gagne. Ngoma ne sara jamais sphalté », craint Alex Ntumwa habitant de la cité de Kamanyola.
Suivre le témoignage de ce chauffeur:
Pour rappel, la RN5 relie Bukavu à Lubumbashi, parcourant 1 356 km². Les villes principales traversées par la RN5 sont, du Nord au Sud, Bukavu, Uvira, Baraka, Fizi, Makungu, Kalemie, Pweto, Kilwa, Kasomeno, Lubumbashi.
Vous aimez nos contenus?
Deboutrdc.net met tout son cœur pour réaliser des contenus interactifs et immersifs que vous pouvez retrouver sur tous vos supports. Journalistes, photographes, graphistes et développeurs collaborent étroitement pendant plusieurs jours ou semaines pour vous proposer des interviews et des analyses qui répondent à une grande exigence éditoriale.
Leur réalisation prend du temps et des ressources considérables. Nous sommes cependant persuadés que ces investissements en valent la peine et avons fait le choix de laisser ces contenus en libre accès et dépourvus de publicité. Un choix rendu possible par ceux qui croient en l'indepenance de notre média.
Pour continuer à travailler en totale indépendance éditoriale et produire des contenus interactifs, deboutrdc.net compte sur vous. Si vous souhaitez nous soutenir, veuillez nous écrire à
directeur@deboutrdc.net ou via WhatsApp à +243 854566913