SUD-KIVU : Non subventionnées, les maisons carcérales deviennent de plus en plus dangereuses
Les milieux pénitenciers deviennent peu rassurants en province du Sud-Kivu. Cette situation qui jadis devrait être solutionnée d’urgence par les autorités est en train de leur échapper nonobstant le danger que courent les détenus et personnels dans presque toutes les prisons. Dans une alerte de l’organisation de défense des droits humains Partenariat pour la Protection Intégrée, les mauvaises conditions dans lesquelles se retrouvent les détenus de plusieurs prisons entre autre la prison de Kamituga et celle de Kalehe ne devraient pas laisser indifférents le gouvernement national ainsi que les autorités ayant dans leurs attributions la gestion des prisons.
Dans son communiqué de presse publié le 14 février 2022, PPI renseigne que Plus de 80% de détenus à la prison de Kamituga sont préventifs et ne vivent que des aides des personnes de bonne volonté. Cette organisation estime qu’une urgence sanitaire devrait s’imposer au vu de la prolifération des maladies telles que la tuberculose et la gale, causes de plusieurs cas de décès qui y sont enregistrés et malheureusement en date du 7 février 2022, un policier y affecté a succombé après qu’un détenu y est décédé au mois de novembre 2021.
Joint au téléphone, Richard Ntege Murhanzi, directeur de la prison de Kamituga, affirme que toutes les informations données par cette organisation de défense des droits humains sont vraies.
« Les données que vous avez eu auprès de PPI sont vérifiées. Ils ont parlé de la situation comme je l’aurai moi-même fait. Au moment actuel, la situation est compliquée à la prison de Kamituga car les détenues passent des mauvais jours, ils ne mangent pas, ils sont malades mais ne sont pas soignés car nous ne possédons pas un personnel soignant et même si ces derniers existaient, nous n’avons pas des médicaments pour soigner les détenus », renseigne Richard Ntege.
En outre, il s’indigne du fait que malgré l’alerte lancée aux autorités tant locales que provinciales à l’occurrence le maire de la ville de Kamituga et la division provinciale de la justice, la situation dans cette prison est loin d’être améliorée.
Contacté, le gouverneur ad-intérim de la province du Sud-Kivu, Théophile Kiluwe Migo indique que la situation demeure précaire dans toutes les prisons de la République Démocratique du Congo et pas seulement dans celle de Kamituga.
« La situation humanitaire est vraiment catastrophique ce n’est pas seulement dans la prison de Kamituga mais dans toutes les prisons de la république. La prison de Kamitugta je la connais très bien parce qu’au moins j’ai vécu à Kamituga pendant beaucoup d’années. C’est fut un dépôt pharmaceutique dans les années 1987 mais qui a été transformé en prison. C’est juste un petit local qui peut contenir 30 personnes mais aujourd’hui ce dernier garde le triple de 30 détenus. Cette prison n’est pas subventionnée comme d’autres prisons de la république et voilà le problème réel de la prison de kamituga», a-t-il dit.
Quant à l’amélioration des conditions carcérales le gouverneur intérimaire du Sud-Kivu fait savoir qu’il ne saurait promettre quelque chose là-dessus parce que les finances en province font défaut. Néanmoins il renseigne qu’il va discuter avec le procureur général pour voir dans la mesure du possible comment expédier certains dossiers et faire rapport à qui de droit au niveau national parce qu’en province, ils sont limités et ne peuvent rien faire en termes de construction de cette prison.
Une logistique défaillante en termes de la gestion des maisons carcérales
La gestion des milieux pénitenciers demeure un point qui échappe à l’autorité à tous les niveaux. Pas des subventions allouées aux prisons, pas des médicaments, ni de la nourriture, plusieurs d’entre elles ne vivent que d’aides extérieures alors que les maisons punitives sont un service de l’Etat et doivent fonctionner avec l’appui tant soit peu du gouvernement national.
Selon Joseph Guhanyika Ganywamulume, ancien ministre de la justice en RD Congo et ancien bâtonnier au barreau de Bukavu au Sud-Kivu, l’expérience liée à la gestion des milieux pénitenciers devient de plus en plus amère vu la multiplicité des prisons au pays mais aussi le relâchement de ces dernières par les autorités.
« Je dois dire qu’actuellement, il y a un peu plus de prisons qu’avant. Cependant, la gestion des prisons qui devrait dépendre de la prévision de l’infrastructure, du manger et des soins médicaux n’est plus le cas chez nous voire, l’enveloppe y allouée auparavant n’existe presque plus, une réalité assez étonnante pour un pays qui se livre à la multiplicité des parquets car vous êtes sans ignorer qu’auprès de chaque parquet du tribunal de paix ou du tribunal secondaire il doit y avoir normalement une prison », renseigne-t-il.
Joseph Guhanyika estime que l’Etat doit penser prévoir un fond alloué au fonctionnement des prisons et doit s’assurer du contrôle de l’enveloppe destiné à ces dernières.
« Il y a 29 ans nous gérions toutes les prisons de la République et il y avait une dotation pour chacune d’elles. Lorsque le ministre signe les chèques de paiement du personnel administratif, judiciaire et des magistrats, il y a un chèque pour les prisons et le montant de subvention doit être partagé dans toutes les prisons du territoire national pour gérer la logistique. Malheureusement, je ne sais pas aujourd’hui comment ça peut gêner les autorités en place. On peut penser à un manque de contrôle de la traçabilité de cette somme », renchérit-il.
Par ailleurs, il recommande aux autorités en place et à l’Etat de revoir la logistique et d’étudier la traçabilité des fonds alloués aux maisons carcérales pour bien s’en occuper. Toutefois, il signale que dans d’autres pays lorsque quelqu’un est en prison il revient à la charge de l’Etat. Selon lui, c’est à l’Etat de revoir sa politique de gestion des milieux pénitenciers car, ce serait dommage que les prisons soient abandonnées à elles-mêmes et qu’elles deviennent des mouroirs ou encore qu’elles vivent de la charité ou qu’elles soient cédées à des organisations caritatives.
Contacté, la chef de division de la justice et garde des sceaux n’a pas été joignable.
Il sied de rappeler que presque toutes les prisons de la République démocratique du Congo ne réunissent pas des conditions dignes des maisons carcérales. Pas plus tard qu’il y a quelques semaines des cas de décès ont été signalés dans la prison d’Aru en Ituri alertant ainsi sur la situation dégradante dans cette maison carcérale. Plus d’un citoyen s’inquiète de cette situation alarmante aux vus et aux sus du surpeuplement des prisons à l’occurrence la prison centrale de Bukavu, les prisons de Kamituga, de mongala, d’Angenga et de Kalehe qui comptent des effectifs souvent deux fois de leur capacité d’accueil.
Hortense Zabona
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