SUD-KIVU : Ces millions des morts qui crient justice (témoignages)
Les victimes des massacres de Fizi, makobola, uvira, katogota, mutarule, walungu, kaziba, mwenga, et partout en République Démocratique du Congo en général et dans la province du Sud-Kivu en particulier, réclament une justice transitionnelle. C’était lors de la commémoration du 11e anniversaire du rapport Mapping sur les massacres perpétrés au Sud-Kivu depuis 1993-2003. Au moment de cette cérémonie, les victimes de ces massacres ont eu à déclarer plusieurs choses et pensent qu’il n’y aura jamais la paix dès lors que les commanditaires de ces massacres seront en train de circuler librement sans être inquiétés par la justice. Pour sa part Denis Mukwege, ces victimes doivent bénéficier d’une justice digne.
Selon quelques témoignages recueillis auprès de certaines victimes, les atrocités commis en R.D.Congo ne doivent pas passer inaperçues. Le témoignage d’une victime native de Kabondozi en Tanganyika qui a requis l’anonymat. Cette dernière avec un sentiment de désespoir, raconte l’atrocité des horribles actes qu’il avait subis en 1997.
« C’était le 1er Janvier 1997, ce jour-là, on avait entendu des coups de balles qui fusaient de partout. Les gens avaient fuient leurs maisons. Le regret est que même là où la population avait trouvé refuge, elle était poursuivie et massacrée sans pardon jusqu’à trouver la mort comme Amatobe chargé des programmes à L’église Méthodiste. On m’avait fait transporter même des minutions et les collègues avec qui l’on était n’ont pas eu la chance de retrouver la vie. Au lendemain, même les habits que portait mon père, étaient déjà portés par des militaires Rwandais sous le commandement de Afande Shetani. C’était la période la plus tragique et atroce que je n’avais jamais vécu dans ma vie ». A-t-il déclaré lors de la commémoration
Pour sa part Asende François, une victime de Fizi dans le secteur d’Abala raconte avec regret la mort tragique de sa mère et de tous ses proches dans une église. Tous tués par balles et d’autres calcinés.
« C’était le 24 Octobre 1996. Ce jour, j’ai perdu toute ma famille, je suis resté seul. C’était un lundi matin, nous étions moi et ma famille dans une église Malikia wa ubembe, les militaires étaient dehors. D’un coup, les gens ont commencé à fuir dans le quartier. Nous étions dans une église en pailles ; les soldats portaient des tenues avec des insignes du Rwanda. Ils ont appelés deux anciens de notre église et les avaient égorgés. C’est ainsi qu’ils ont commencé à tirer des balles réelles sur les fidèles dans l’église pendant plusieurs heures et beaucoup de personnes avaient perdu la vie. Juste après ils ont mis le feu sur l’église puis ils ont dit en Kinyarwanda ‘’twigendere’’ pour dire partons. C’est ainsi que je me suis réveillé dans le coin où j’étais assis pour voir si ma mère était encore en vie hélas qu’elle était déjà morte à cause des belles, même mon petit frère de quatre mois que portait ma mère était aussi atteint par le feu, je l’avait récupéré et on s’était réfugié dans la foret pendant deux jours et nous avions eu le secours de la Croix- rouge qui nous a transféré en Tanzanie pour les soins. Dans l’église nous étions à 284 personnes et 17 seulement avaient survécu. »
Simon Cibalonza, fondateur de Katogota massacre Foundation, et initiateur de l’érection du monument de Katogota, étant un des rescapés de ces atrocités en 2000 pense que le moment n’est de pleurer mais plutôt de braver la peur car les bourreaux de ces crimes n’hésiteront pas de corrompre de toutes les belles manières les victimes qui continuent à réclamer que justice soit faite.
A en croire le prix Nobel de la paix 2018, alors que l’accès à la justice transitionnelle soit un mécanisme de promouvoir la justice, Denis Mukwege est consterné de voir que les victimes des atrocités en République Démocratique du Congo ne profitent de rien en matière des droits de l’homme comme est le cas dans certains pays de l’Afrique. Il l’a fait savoir lors de la 48ième session du conseil des Nations Unies aux droits de l’Homme.
« A l’instar de n’importe quel peuple, les victimes congolaises n’sont-elles pas droit à la vérité, à la justice, à des réparations et à des garanties de non-renouvellement des atrocités en conformité avec les recommandations formulées dans le rapport Mapping. Dans de nombreux pays notamment au Rwanda, Sierra Leone ou en République Centrafricaine, les nations unies se sont pleinement investit dans la mise en place des mécanismes de justice transitionnelle. » S’étonne Denis Mukwege.
En outre la lutte du prix Nobel de la paix 2018, sollicitant un tribunal pénal international et une justice transitionnelle pour les victimes des massacres afin que les auteurs de nombreux massacres commis en RDC soient jugés, Mukwege a témoigné d’un manque d’intérêt des Nations Unies en ce qui est de faire bénéficier la R.D.Congo des différents mécanismes de consolidation de la paix.
« La plupart des opérations de maintien de la paix développe aujourd’hui des taches dans le domaine de la justice transitionnelle. Le conseil de sécurité considère aujourd’hui que l’accès à la justice transitionnelle est une condition de la pérennisation de la paix confirmant l’intégration de la justice transitionnelle au sein des outils de maintien et de la consolidation de la paix malheureusement mon pays, la République Démocratique du Congo ne bénéficie pas jusqu’à ces jours des tous ces efforts des Nations unies en la mise en place des mécanismes de la justice transitionnelle. »
Par ailleurs, Homer Bulakali un élu de la province du Sud-Kivu pense que le temps n’est plus aux attentes. Plusieurs années durant, les crimes commis à l’Est de la RDC demeurent sous silence. Il est temps que les auteurs de ces différents massacres subissent la rigueur de la loi et que l’ONU rende compte de sa position dans ce dossier.
« Le peuple congolais est un peuple patient, mais il vrai que d’un moment la patience arrive à sa fin. Voilà pourquoi, nous exigeons la création d’un Tribunal pénal International pour le Congo afin de lutter contre l’impunité des auteurs de crimes graves tels que répertoriés dans le rapport mapping publié de 1993-2003. Que les Nations Unies nous disent comment ils ont exhumés nos morts, qu’elles nous montrent tous ces ossements si ce n’est pas une façon d’effacer les traces. »
Par Diaz Bahati et Hortense Zabona
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